Ça sentait le jasmin

Jasmin 600

VANESSA BELL

Photo: Satya Jack, www.jackraw.com

Ça sentait le jasmin

 

Et en tous lieux j’entends des formes de toi qui ravales mes paroles.
Tu poses encore les mêmes questions et te régales de ce que j’ai oublié de ma dernière réponse.
Et les incongruences te donnent satisfaction
de savoir que mes mensonges ne pourront être éternels.
Alors tu louves,
tu guet-apenses mes valses et la première marée.

Assure-toi que le nœud est toujours coulant et
que la corde glissera,
que son diamètre étendu sur des kilomètres autour de moi
se lovera contre mon cou
chaque fois que l’envie de me jeter face contre sol
t’envahira.

Je me déshabille à l’envers
en prenant soin de déposer avec tendresse chaque organe que tu réclames.
Et tu salives à la vue de cette table ensanglantée
dont tu ne touches pourtant rien.
Sinon pour éclater violemment mes rognons.
Signifier à toute la pièce que j’empeste.

 

Je me rappellerai que je suis moi aussi dotée de couilles grosses comme ça
et que je peux te mordre au visage,
te rafler un œil,
te tirer les oreilles
te faire taire dans un combat égal à égal.

J’avais oublié, dans ma stupeur,
mon prêt de destruction
qui me donne une avance confortable dans ce duel.

Tu cesseras dès lors de dire que je suis une crisse de conne et que tu m’aimes.
Ton rang n’aura plus de valeur.
Et je mettrai le feu à toutes tes maisons où tu déposes de l’espoir.
Et je hurlerai à tes femmes que tu n’es que carcasse vide,
car assurément,
elles seront dupées de ton errance diligente;
n’y verront qu’un enfant à protéger de lui-même.
Un amoureux perdu tout au plus.

D’aucunes n’effleureront mes cris bourdonnants,
de peur de perdre l’amant d’Olympe,
la promesse d’Amérique,
le droit qu’elles ont toutes de croire qu’elles ont trouvé.

Si j’avais de telles maîtresses, je ne les aimerais qu’à genoux.
Alors à une d’entre elles, je remettrai du béton armé.
En prenant soin de mentionner de ne pas prononcer les vœux,
En m’assurant qu’elle soit pleine de cash.
Tu seras fait de sable, de course, de lointain,
Et tes guns braqués sur mes tempes se perdront dans la mer.

 

 

Ode à un champ lexical qui me fait chier

 

Fréquentation
La personne que j’ai rencontrée
Fuckfriend
Sex friend
One night
Maîtresse
Ami moderne
Une bonne connaissance
Ami ++

Un ami

Il y a quelque chose de grave
Et de terrible
Dans la rencontre de l’Autre.

Pour y survivre,
il faut beaucoup de gris,
de patience.
Ce dont je suis dépourvue.

 

Le glitter de Walt Disney me
donne envie de Balzac et de Stendhal,
de mots précoces.
Et immuables.
De certitudes plates que je regretterai
une fois qu’elles seront nommées.
Car oui,
j’ai peine à m’extraire
du conditionnement.

Quand les mots seront frappés
débutera la séduction mathématique.
Retenir le like
Ne pas t’écrire dans la nuit pour te parler de sujets

Que je ne connais pas.
Mais qui t’intéressent.

Et qui font de moi
une utilisatrice effrénée
pathétique
de Wikipédia.

 

Je m’étourdirai à force de languir
jusqu’à tomber, sur le sexe
d’un autre.
Confirmer
Ce que tu ne veux plus me dire;
Que je suis désirable.
Instantanément.

Ton corps mécanique
Me laissera à penser que mes formes
de femmes
te sont répulsives.
Que ton sexe se gonfle
À l’unique idée de décharger.

Te sortir,
pour la nuit
de ta condition orpheline.
Faire le plein
d’humanité.

Juste assez.

Avant de me glisser
sur la gauche.

 

 

Eau de Pâques

 

S’offrir un con
sans maternité.
Le noyer d’eau de Pâques
dans l’espoir
immortel
de celui qui hésite
entre le cul et le cœur.

 

 

 

Arès

 

Devenir femme sous le regard vertical des matraques sourdes,
des caresses de guns le long de mes joues.

Mon bulbe en fleur
empeste la chair vierge et
j’offre mes pistils en guet-apens
aux imbéciles heureux
de ne voir plus loin
que le rose de mes lèvres.

Consommer les hommes comme
on éclate le crâne d’un chien.

  1. Émietter.
    Jusqu’à ce que docilité s’en suive.

Amores Perros.
Détruire                          amoureusement.
En berçant les restants.

Se revêtir de Furies.
Et pourtant,

n’y rien comprendre
à la fuite d’Arès.

 

 

 

Diamonds Are a Girl’s Best Friend

 

Balle antistress
sur écran bleu.
Fastfoward sur l’incipit.

Une femme
s’enfonce
un chapelet
anal
orné d’un diamant arc-en-ciel.

Reflets d’essence dans l’eau stagnante
le long de la chaîne de trottoir
un après-midi de juillet.

Gorge assiégée,
Elle chante aux troupes.

Yeah Baby,
Fuck me.
Harder.

You Wanna Fuck That Pussy?

N’avoir ni honte,
ni compassion.

Cliquer jusqu’à plus soif.
Pour le repos de mon
corps las
qui manque
de fleurs.

Et de tendresse.

 

 

 

Shop à balles

 

Tu me donnes envie de me dégueuler tout entière.

 

À l’idée de ton sexe chaud et pulsant.
Répulsant.
De penser mon cerveau en quête constante de ton membre érectile.

Tu me donnes envie de taper du tambour,
De brûler ton frame.

 

Je n’ai même pas honte des figures de répétition.
Désormais, j’écris comme je veux.

Ma parole libre, ma forme banale, mon corps graisseux
Et magnifique.

Tout à moi.

Je me garde jalousement.

 

Ta tête triangulaire,
Ton iris obèse,
Le filet de bave entre tes lèvres
quand tu parles,

Je détruis tout.
Ton humanité et ton cœur

artificiels,
Ta manière suave et collante de dire Amour.

Limoilou din veines,
La ruelle de juillet remonte le long de mon système nerveux.
J’te kick la canisse dans face.

Garde tes cendres.

 

 

 

LORANGER

 

L’Arizona tapisse le centre-ville depuis une semaine.

Ton paradis bleu de banlieue qui m’avait laissée tiède depuis toujours prend des airs de Sibérie-mon-amour.

Le train de ville joue au zootrope, défilant dans une ronde étourdissante mes rues sales jusqu’à ta campagne. Le manège optique passe du gris au vert, là où les rats deviennent chevaux.

J’arrive à ta gare minable de ville défusionnée qui sent Loranger. Je me dis que tu aurais pu venir me chercher. Vraiment.

Le soleil comme un guêpier pour ma peau trop blanche. La chaleur me fait saigner du nez et tu m’accueilles de ton plus doux regard carnassier.

J’ai 16 ans, je suis chez toi et tes parents n’y sont pas.

Affamé, tu remontes ma robe à pois pour dévoiler mon cul rebondi à tes champs infini. Des lambeaux rouges tombent au sol alors que ton avant-bras se paye un tour de reins.
Nos langues s’escargotent jusqu’à ce que notre nudité flotte en apesanteur.

Minutieusement, ma bouche se fait joaillère alors que j’invite les yeux de tes voisins à ma première exposition internationale.

Fast Foward dans ton sous-sol.

C’est noir, ça suinte, c’est humide plate. Ton lit est trempe, mais j’veux rester.

Première leçon de strip poker.

Je joue la conne, mes vêtements sont inutiles.
Chaque morceau gagné se paye au prix de l’entrée d’un nouveau membre de ton corps policier.

Rapidement, vous êtes en surnombre et je suis seule représentante de mon espèce.

J’ai 16 ans, vous en avez 20, vous avez le pouvoir et personne ne m’a jamais dit que je suis belle.

De l’autre côté de la porte, la cave.

Le bus passe pu, mon père travaille, mon vélo est à maison.

Des trois lits qui longent les fondations, tu m’assignes celui du centre.
Nous sommes cinq, c’est l’austérité avant le temps.

Tu sors de ta chambre pour venir chauffer mon corps. T’as senti mes pieds mortifiés, mon enfance hésitante. Cachée derrière mon corps de femme, chu p’têtre pas aussi hot que tu pensais.

Depuis mon lit, tu parles d’autres filles avec les gars qui nous entourent. Tu gagnes, j’éteins mon cerveau.

À ton tour. Fuck ma matrice.

 

 

Simon se joint le premier. Ma face doit avoir des airs de Bambi dans l’incendie parce que tu m’dis que c’est correct, que vous avez l’habitude ensemble.

Vous êtes des genres de Milli Vanilli du cul. Trop cheap intellectuellement pour mesurer la porcherie que vous nourrissez.
Ici, Jésus et Bouda n’ont rien à vous envier, c’est votre dogme qui dirige vos queues.

Tes mains sont un étau d’où ma tête ne peut bouger. Mon sang pulse dans mes tempes, j’ai le regard rouge, j’en suis sûre.

Avoir été smats, vous auriez choisi les trous inverses, vu la taille de vos engins respectifs.

Mais non.
Vous vous enfoncez.

Vos souffles de bœufs brouillardent ma tête.
Le frottement de vos membres roulent sur mon ventre jusqu’à ma gorge. Spasme.

Souffle coupé.              Blackout.

À mon réveil, la Sainte Trinité me berce de ses verges. Il n’y a pas de doutes, vous êtes arpenteurs-géomètres experts. C’est plat, tout est bouché. Montréal songe à vous engager.

Je l’sais pas encore, mais c’est presque fini.
Les fourmis dans ma face me sauvent la vie.

Dans ma tête, ça scintille.

La Beauce.
Ça siffle, c’est blanc et le poêle à bois est bon.

Je m’estampe le cadre dans face, l’image doit tenir jusqu’à épuisement des stocks.

Mon monstre à cinq têtes donne ses derniers coups de tentacules là où il peut.
Votre sang bat en retraite.

 

Vous ne bandez plus.

 

 

 

 

David se sent cheap, m’offre une ride jusqu’à la maison.
J’entre dans ma ville-asphyxie comme on se glisse dans le lit de ses parents à cinq ans.

Touch down, chu pas morte.