Les animaux domestiques en contexte de COVID-19

MARYSE MARTEL

Illustration : Virginie Larivière

 

Comme beaucoup d’autres personnes qui travaillent dans les services jugés essentiels, je n’ai pas vécu le pire de la COVID chez-moi, isolée. Depuis le début de la pandémie, je partage mon temps de confinement plus ou moins strict entre deux maisons; la mienne et la Maison des femmes de Québec. Dans une de ces maisons, je suis confrontée à la détresse, la peur et le courage (mais aussi à la douce folie de mes collègues !). Dans l’autre, j’ai le privilège de vivre l’amour, le confort et, quand les enfants me donnent un lousse, la tranquillité. Dans ma maison, je cohabite avec trois humains (mon amoureux et mes deux enfants) et deux chats. En observant ma petite famille confinée, j’ai constaté que mes deux colocs poilus semblaient envahis par cette présence inhabituelle. Leurs habitudes ont été bousculées. Bon, on s’entend, il y a pire que ça dans la vie, mais ça m’a tout de même fait prendre conscience que les animaux domestiques, par leur vulnérabilité, peuvent aussi devenir des victimes de cette pandémie.

En tant qu’antispéciste, j’ai été extrêmement préoccupée par tout ce que j’ai lu sur les réseaux sociaux et les médias au printemps passé. Par exemple, aux États-Unis, on a observé une vague d’abandons d’animaux domestiques. En France, une clinique vétérinaire a publié un message sur sa page Facebook avisant la population de ne pas laver leurs animaux domestiques au gel hydroalcoolique (Purrell) ou au désinfectant, car plusieurs chats et chiens auraient été reçus chez le vétérinaire en état de coma éthylique, intoxiqués ou avec des brûlures cutanées. Ici, au Québec, les éleveurs d’animaux et les animaleries ont profité de l’élan de sympathie à l’endroit des chats et des chiens abandonnés que la crise du coronavirus suscite pour vendre leurs animaux sans se soucier du sort de ceux-ci.

Les animaux qu’on a domestiqués sont mis par nos crises dans des situations très précaires. Les ayant rendus peu aptes à se nourrir par eux-mêmes, il est de notre responsabilité de ne pas les laisser tomber.

 

Animaux et COVID-19 : risques de transmission

 D’après l’Organisation mondiale de la santé animale, les animaux de compagnie ne méritent pas du tout la méfiance dont ils ont parfois fait l’objet pendant cette crise. Pour l’instant, il n’existe aucune preuve que les animaux de compagnie présentent le moindre danger pour leurs humains.

Certain.e.s ont peut être entendu parlé du cas du chien à Hong Kong, sur qui on aurait trouvé des petites quantités de l’ARN du virus. Ce chien vivait avec une personne atteinte de la COVID-19. D’après les chercheurs qui ont fait ces analyses, il est probable que le virus ait effectivement été transmis au chien par la personne malade. Le chien était cependant très peu infecté et il n’était pas malade.

L’Organisation mondiale de la santé animale indique que la propagation actuelle de la COVID-19 est le résultat d’une transmission d’humain à humain. Il n’est donc pas justifié de prendre des mesures à l’encontre des animaux de compagnie qui pourraient compromettre leur bien-être.

Les expert.es s’accordent tout de même pour dire que la distanciation s’applique aussi aux animaux de compagnie. Même si les risques sont minimes, il est préférable de limiter les contacts de notre animal avec des personnes qui n’habitent pas avec nous, car, même s’ils ne peuvent transmettre la maladie, ils peuvent transporter le virus sur eux.

 

Soins

Il y a quand même quelques précautions à prendre avec les animaux face à la COVID-19 :

  • éviter d’exposer les animaux aux personnes potentiellement infectées, aux animaux de ces dernières ou à un environnement potentiellement contaminé;
  • éviter les parcs à chiens;
  • ne pas toucher inutilement les animaux qui ne sont pas les nôtres. Je discutais avec ma voisine qui a un chien et elle me disait que cette précaution n’est pas encore intégrée dans le quartier…

Bref, il y a très peu de chances que cela arrive, surtout si vous appliquez les consignes de base : rester loin des gens qui n’habitent pas avec vous, lavez-vous les mains et ne sortez pas de chez si vous avez le virus.

Et si vous êtes encore inquiet.e.s, vous pouvez nettoyer les pattes de votre animal avec de l’eau et du savon et les sécher… Comme vous le faites pour vos mains.

 

 Réalité des SPCA et des refuges

 Considérés comme un service essentiel, les refuges animaliers poursuivent leurs activités, mais de nombreuses restrictions leur compliquent la tâche. Je suis allée consulter la page internet de la SPCA de Montréal (parce que j’apprécie le travail de la directrice, Élise Desaulniers, une militante pour les droits des animaux) pour me donner une idée de la situation des grands refuges au Québec, et j’ai été heureuse d’apprendre que, contrairement aux États-Unis, les Québécois.e.s semblent s’être montré.e.s plutôt responsables. On constate que certains refuges ont même enregistré une augmentation des demandes d’adoption au début de la crise sanitaire. Selon Élise Desaulniers, cette augmentation des demandes serait une conséquence directe de la situation de confinement : les gens ne travaillaient pas, ielles avaient du temps. Ielles se sont retrouvé.e.s face à une situation sur laquelle ielles n’avaient aucun contrôle et voulaient aider.

Depuis le début de la pandémie, dans la plupart des SPCA, seuls les abandons urgents sont pris en charge, soit ceux d’animaux blessés, malades, dont la vie est en danger ou qui ont mordu des humains. Ce n’est peut-être pas le moment d’aller porter votre chat si votre coloc ne l’aime pas ou est allergique !

En revanche, les associations, qui ne fonctionnent qu’avec des bénévoles pour la plupart, doivent dorénavant composer avec les nouvelles mesures restrictives, ce qui force une réorganisation qui risque de ralentir le rythme des placements d’animaux dans des familles. Comme l’Association vétérinaire québécoise de médecine de refuge (AVQMR) et l’Ordre des médecins vétérinaires du Québec (OMVQ) ont recommandé de suspendre toutes les interventions médicales non urgentes, la stérilisation des chats et les vaccins doivent attendre, ce qui réduit considérablement la disponibilité des chats à l’adoption. Si la crise perdure, ça risque d’être catastrophique. Avec toutes les portées de chatons et de bébés écureuils en plus des abandons d’animaux pour cause de déménagement…

Les refuges, que ce soient les SPCA ou les petites associations, vivent essentiellement des dons et de leurs activités de financement autonomes. Comme me l’expliquaient deux femmes très impliquées à l’association Mouvement chats errants, mesdames Andrée Juneau et Anne Drobiszewski, la situation est très préoccupante pour la survie de leur association qui vient en aide aux chats errants dans la ville de Québec. Le mouvement se finance habituellement en grande partie par des kiosques dans des marchés aux puces au printemps et à l’été. Comme cette année ces marchés ont tous été reportés ou annulés, Mouvement Chats errants perd une grande partie de son financement. Les militantes du mouvement sont aussi conscientes du fait que les pertes d’emplois liées à la pandémie, ainsi que l’insécurité financière généralisée par la crise de la COVID, auront un effet certain sur les dons.

 

 Les animaux ne servent pas juste à combler un vide !

Dans une période d’isolement, il faut l’admettre, avoir un animal à ses côtés c’est rassurant et, pour certaines personnes, ça permet d’apprivoiser la solitude. L’Association canadienne des médecins vétérinaires rappelle d’ailleurs que les animaux de compagnies contribuent à notre bonheur et à notre bien-être, surtout en période de stress. Le fait de faire des promenades avec son chien ou de passer du temps avec son animal de compagnie peut contribuer à se garder et garder son animal en bonne santé. Profitons-en !

Oui à l’adoption, mais encore faut-il que ce soit pour les bonnes raisons. Adopter un animal, c’est quand même un engagement à long terme. Il ne doit pas servir qu’à combler un vide ! Lorsque la crise sera terminée, on ne pourra pas s’en départir comme on le fera avec la vieille motte de chou kale dans le fond du tiroir à légumes ! Il est vrai que le confinement semble être un moment idéal pour intégrer un nouvel animal dans la famille, mais il est important de réfléchir à l’avenir. Qu’arrivera-t-il lorsque la crise prendra fin ? Les adoptant.e.s pourront-ielles toujours prendre soin de leur animal ? La décision d’adopter ou de se procurer un animal doit être réfléchie. Car une fois la crise de la COVID passée, votre animal de compagnie demeurera toujours un membre de la famille.

Je terminerais en vous disant que si comme moi, vous êtes sensibles à la cause animale et que vous faites partie des personnes privilégiées qui n’ont pas eu à subir une baisse de revenu, SVP, allez faire un don dans un refuge. Je suis consciente que ce n’est pas évident pour tout le monde, mais si c’est possible, go !

 

Pour soutenir la cause animale pendant la crise de la COVID-19… Faites un don !

Mouvement Chats Errants

 Éducazoo-Québec

Adoption Chats Sans Abri

SPA de Québec

Les Fidèles Moustachus